Projet de Lignes directrices sur les accords permettant d’atteindre des objectifs de durabilité de l’autorité néerlandaise de la concurrence
Le 15 juillet 2020 Par Jérémy BERNARD
1. Le 9 juillet 2020, l’Autorité des consommateurs et des marchés néerlandaise (Autoriteit Consument & Markt) a publié son projet de Lignes directrices « Accords de durabilité » pour consultation publique. Conformément à ce projet, l’autorité nationale de la concurrence des Pays-Bas vise à établir les critères selon lesquels seraient autorisés des accords anticoncurrentiels permettant d’atteindre des objectifs de durabilité tels que la réduction des émissions de carbone.
2. Le projet de Lignes directrices « Accords de durabilité » est fondé sur le mécanisme classique de l’exemption de l’interdiction des accords anticoncurrentiels prévu à l’article 6, paragraphe 3, de la loi néerlandaise sur la concurrence (Mededingingswet) et à l’article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après le « TFUE »). En vertu de ce mécanisme, lorsqu’un accord restreint la concurrence sur un ou plusieurs marchés pertinents mais génère des avantages allant au-delà de ses effets négatifs sur le(s) marché(s), cet accord échappe à l’interdiction des accords anticoncurrentiels et se trouve être réputé conforme au droit de la concurrence.
3. Le projet de Lignes directrices « Accords de durabilité » vise à fixer de nouveaux critères d’exemption des accords anticoncurrentiels qui permettent d’atteindre des objectifs de durabilité. La nouveauté est que la balance entre les avantages induits par ces accords et leurs effets négatifs ne serait plus effectuée sur le seul marché. Elle serait étendue pour autoriser une comparaison des avantages issus desdits accords pour la société dans son ensemble à leurs inconvénients sur le(s) marché(s) concerné(s), et assurerait que les accords seraient validés lorsque les premiers dépassent les seconds. Cette extension du périmètre de la balance pourrait entraîner une augmentation du nombre d’accords éligibles à l’exemption.
4. Néanmoins, l’effet de ce projet de Lignes directrices (s’il est adopté) restera limité jusqu’à ce que la Commission européenne publie une disposition équivalente. En vertu des articles 3, paragraphe 1er, 5 et 6 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité in fine, l’autorité nationale de concurrence ou la juridiction nationale d’un État membre doive interdire un accord qui relève du champ d’application de l’article 101 du TFUE, restreint la concurrence en violation de l’article 101, paragraphe 1er, du TFUE et ne peut bénéficier d’aucun des règlements d’exemption par catégorie de l’Union européenne ou de l’exemption individuelle de l’article 101, paragraphe 3, du TFUE, quand bien même cet accord serait conforme aux dispositions nationales de concurrence de l’État membre en question.
5. Dans un communiqué du 9 juillet 2020, la Commission européenne a précisé qu’elle prenait bonne note du projet de Lignes directrices « Accords de durabilité » de l’Autorité des consommateurs et des marchés néerlandaise. Elle indiquait également qu’elle travaille sur une approche similaire à celle développée dans le projet de Lignes directrices néerlandaises dans le cadre du processus de révision des deux règlements d’exemption horizontale, à savoir le règlement (UE) n° 1217/2010 de la Commission du 14 décembre 2010 relatif à l’application de l’article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à certaines catégories d’accords de recherche et de développement et le règlement (UE) n° 1218/2010 de la Commission du 14 décembre 2010 concernant l’application de l’article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à certaines catégories d’accords de spécialisation, et la communication de la Commission Lignes directrices sur l’applicabilité de l’article 101 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux accords de coopération horizontale.
6. Le même jour, l’Autorité de la concurrence (française) a rendu public son intérêt pour la nouvelle approche du projet de Lignes directrices « Accords de durabilité » de l’Autorité des consommateurs et des marchés néerlandaise, dont l’autorité française a déclaré qu’il alimenterait sa réflexion. Si un consensus finit par émerger au sein des autorités nationales de concurrence des États membres, il est à parier que la Commission européenne agirait rapidement sur cette question. A ce titre, le soutien de l’Autorité de la concurrence (français) est important compte tenu de son influence au sein de l’Union européenne.
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